lundi 31 août 2009

Dangereuse lecture

Tu dois lire ! Vous devez lire ! Il faut lire !
Ces prochains jours, bon nombre de parents et d’enseignants reprendront cet « interminable litanie de la parole éducative : il faut lire… », lire pour apprendre, lire pour réussir, lire pour…
« Lisez pour vivre ! » que disait déjà Flaubert à son amie Louise. Mais si Flaubert « renvoyait la Louise à ses bouquins, c’était pour qu’elle lui fiche la paix, qu’elle le laisse travailler tranquille à sa Bovary, et qu’elle n’aille pas lui faire un enfant dans le dos. » (cf. Pennac - Comme un roman – Ed. Gallimard)
Tu dois lire ! Et si l’enfant vous répondait : « Lire ? Si j’veux, quand j’veux, où j’veux, c’que j’veux »




Personnellement je ne me souviens pas d’avoir entendu cette injonction de lire dans la bouche de mes parents ; au contraire, à l’heure où les enfants sages devaient dormir pour être en forme en classe le lendemain, mes parents me disaient avec un soupir dans la voix (un gros soupir): « T’es encore en train de lire ». Ils pouvaient toujours causer, eux qui, je le savais très bien, lisaient souvent jusque tard dans la nuit, eux qui au petit-déjeuner avaient déjà le nez plongé dans un bouquin, eux qui adoraient emporter aux toilettes « quelque chose » à lire, eux qui m’emmenaient de bon cœur à la bibliothèque car ils en ressortaient avec au moins autant de livres à dévorer que moi… D’ailleurs, à la bibliothèque, pour avoir le droit d’emprunter plus que cinq livres par semaine, j’avais trouvé une super combine : j’utilisais les cartes de mes 3 grands-frères. De quoi tenir le siège pendant toute une semaine !
Contaminée très jeune par le terrible virus de la lecture, je crois que je ne guérirai jamais de cette douce maladie. Non, ce que j’ai entendu ce n’était pas « tu dois lire ! » mais bien plus « arrête de lire, fais tes devoirs ! », « arrête de lire, va jouer dehors ! » (ah oui, par beau temps il fallait s’aérer…), « pose ton livre, viens manger ! ». Résultat :
-je n’ai pas fait de longues études et je ne suis pas bardée de diplômes
-je suis nulle aux jeux de ballons et je ne sais pas tenir sur une bicyclette
-je suis une plante de serre, pâle comme un cachet d’aspirine
mais je suis heureuse,
-heureuse de pouvoir jongler avec les mots, d’écrire et de dessiner pour les enfants,
-heureuse de pouvoir m’évader par les fenêtres des livres,
-heureuse de ne pas avoir attrapé de cancer de la peau par surexposition au soleil,
heureuse de pouvoir lire.

Est-ce que dans la famille nous avons tous contracté le virus de la lecture? Oui et non, en tout cas pas de la même façon. L’aîné de mes trois frères est celui qui lisait le moins, du moins pratiquement pas de romans, uniquement des livres scientifiques, des notices techniques, des B.D., des livres de photos. Cela ne l’a pas empêché de devenir médecin. Alors, le « tu dois lire pour réussir dans la vie, pour avoir un bon métier », bof !
Le troisième de mes frères a appris à lire bien plus tard que la moyenne des enfants. Il appréciait que les parents lui fassent la lecture chaque soir, aimait regarder des albums (lecture d’images), mais ne voyait absolument pas l’utilité d’apprendre à lire lui-même jusqu’au jour où, passionné par les mathématiques il lui a bien fallu s’y mettre pour pouvoir lire les énoncés des problèmes, ces jeux qui le passionnaient tant. Depuis, il a dévoré bon nombre de B.D. et de Bob Morane, une montagne de littérature fantastique, s’est passionné pour l’informatique et est devenu ingénieur chez Microsoft.
Point de vue lecture, c’est probablement avec mon frère n°2, danseur classique (maintenant skippeur) que j’ai le plus de points communs ; il a toujours beaucoup aimé lire et c’est avec lui que j’ai découvert toute jeune le Salon du Livre Jeunesse de Montreuil et la La Foire du livre de Paris, manifestations impressionnantes pour un petit bout de chou venant du fin fond de l’Alsace.

En tout cas, ce n’est pas en lisant beaucoup que l’on devient bon(ne) en orthographe ; j’en suis une preuve vivante avec mon orthographe depuis toujours débordante d’originalité et de fantaisie. C'est tellement plus beau ! Mes anciennes institutrices ne me contrediront sûrement pas… et vivent les dictionnaires !

3 commentaires:

  1. Vraiment très mignon ! j'aime beaucoup !

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  2. je me reconnais tout à fait dans cette description... jusqu'à l'orthographe!

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  3. Tout à fait d'accord avec toi , Sarah ! Il est vrai que ton amour de la lecture peut provenir de ta propension à "visiter" de fond en comble les étagères de la BCD de ton école primaire .
    Quant à ta fantaisie orthographique elle provenait , me semble-t-il , d'un irrésistible besoin de création artistique .. que tu as su révéler plus tard . Tout est question de temps .... Avec toute l'amitié de ton ancienne directrice . Michèle .

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